Cotnam, Sansfaçon, Baudouin
Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant annulé une résolution qui avait accordé une dérogation mineure et ordonné la démolition d’un immeuble. Accueilli.
En mai 2013, le mis en cause Molla a obtenu un permis pour la construction d’une maison. Au mois de septembre suivant, une représentante de la ville appelante a constaté que ce permis avait été accordé en violation de la règle d'insertion prévue à l'article 116 du règlement 502-2005 de zonage. Le 28 octobre, le comité consultatif d’urbanisme (CCU) a recommandé au conseil municipal d’accorder une dérogation mineure visant à réduire la marge avant minimale sur la rue de 15,67 à 7 mètres afin de régulariser l'implantation de cette résidence. Le 8 juillet 2014, le conseil municipal a adopté une résolution qui accordait cette dérogation mineure. Les intimés, qui sont des voisins de Molla, ont déposé un pourvoi en contrôle judiciaire de cette résolution, lequel était accompagné d’une demande en démolition de l’immeuble.
Le deuxième alinéa de l’article 145.4 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (RLRQ, c. A-19.1) énonce que : « La dérogation ne peut être accordée que si l’application du règlement a pour effet de causer un préjudice sérieux à la personne qui la demande.» Le juge de première instance a interprété ce premier critère comme imposant l’obligation de s’assurer que la dérogation demandée cause un préjudice sérieux à la personne qui en fait la demande, alors que ce n’est pas ce que prévoit la disposition. Cette erreur est déterminante puisque le juge a fait supporter sa conclusion voulant que l’appelante ait privilégié l’avenue de la dérogation mineure afin d’éviter une éventuelle poursuite en dommages-intérêts sur cette absence d’analyse des dommages que l’octroi de la dérogation causerait à Molla.
Or, rien dans la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme n’indique qu’une étude officielle et écrite est requise. Il peut être tout à fait justifié, voire usuel, que les critères permettant d'accorder une dérogation mineure ne soient analysés qu’après le dépôt de la demande, comme en l’espèce. Par ailleurs, l’obligation de tenir compte des critères prévus dans la loi incombe aux élus municipaux qui, en fin de compte, décident s’il y a lieu de l’accorder, et non aux officiers municipaux ni aux membres du CCU, qui ne font que présenter leurs recommandations aux élus.
Ainsi, le juge ne pouvait limiter son analyse des intentions de l’appelante aux seuls gestes commis par ses employés lors de la première étape du dossier et conclure, comme il l'a fait, que les fautes alors commises viciaient tout le processus. C’est au moment du vote qu’il devait se placer afin de déterminer si la décision des élus prenait appui sur un travail incomplet ou biaisé. À cet égard, la preuve que le juge n’a pas traitée montre que, le jour du vote, les membres du conseil municipal étaient parfaitement au fait des critères permettant d’accorder la dérogation mineure, tout comme les récriminations des propriétaires des immeubles voisins.
D’ailleurs, quant au deuxième alinéa de l’article 145.4 de la loi, soit celui portant sur l’atteinte à la jouissance du droit de propriété des voisins, le juge a outrepassé les limites d’intervention accordée par la norme de contrôle judiciaire en s’ingérant dans le rôle des élus auxquels le législateur a confié le pouvoir d’en apprécier l’importance.
Législation interprétée : article 145.4 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme
Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca