Cour d'appel du Québec

R.T. c. R.

Morissette, Hogue, Sansfaçon


Appel d’une déclaration de culpabilité. Rejeté.

L’appelant, qui est d’origine chinoise, a été déclaré coupable sous un chef d’accusation d’agression sexuelle à l’égard de sa conjointe. Les policiers ont fait appel à l’assistance d’un interprète lors de la lecture des droits à l’appelant et de son interrogatoire, lequel a été enregistré et reçu en preuve. Au procès, un interprète officiel a été mandaté pour souligner les écarts entre ce qui a réellement été dit et les propos interprétés lors de l’interrogatoire policier. L’appelant fait valoir que le juge de première instance a erré en refusant de reconnaître son droit à l’assistance d’un interprète lors de cet interrogatoire et en refusant d’ajourner le procès à la suite du retrait de son avocat. Ces erreurs l’auraient privé d’un procès juste et équitable.

Le droit à l’assistance d’un interprète est prévu à l’article 14 de la Charte canadienne des droits et libertés (L.R.C. 1985, app. II, no 44, annexe B, partie I). Ce droit naît au moment où la personne devient une partie dans une instance, ce qui couvre le procès et les phases préalables au procès comme la comparution, l’enquête sur la remise en liberté et l’enquête préliminaire. Cela exclut les étapes préalables à la comparution, dont l’enquête policière, à laquelle la personne est libre de ne pas collaborer. En l’espèce, le juge s’est assuré que, malgré le travail déficient effectué par l’interprète lors de certains des échanges entre les policiers et l’appelant, ce dernier avait donné une version des faits qui n’avait pas été viciée par les erreurs de l’interprète.

Le juge ne pouvait opposer le droit d’être représenté par un avocat, qui est constitutionnellement protégé, et la gestion efficace du dossier. De même, il est délicat d’opposer le droit d’être représenté par un avocat lors du procès et le droit à une audience dans des délais raisonnables, ces 2 droits étant également protégés. En concluant que la demande de remise de l’appelant ne visait pas un moyen détourné, le juge aurait dû accorder la remise du procès. De plus, il aurait dû s’efforcer de se rendre disponible à des dates plus rapprochées en cas de remise. Or, les 3 jours où l’appelant n’a pas été assisté d’un avocat ont été consacrés à l’écoute de l’enregistrement vidéo de l’interrogatoire policier et aux corrections apportées à l’interprétation de celui-ci. Cette étape ne requérait pas la participation active de l’appelant ni celle de son avocat et aucune autre preuve n’a été présentée à cette occasion. Le refus du juge de reporter ce visionnement n’a pas privé l’appelant de son droit à une défense pleine et entière et à un procès équitable.

Par ailleurs, le juge n’a pas erré en mentionnant à l’avocat de l’appelant que celui-ci ne pouvait lui-même tenter de contredire l’interprète officiel sur la base de sa propre connaissance de la langue de son client. Enfin, rien n’empêchait l’avocat de l’appelant de faire entendre un témoin expert dans le but de démontrer que l’interprète officiel avait mal exécuté son travail. Aucune demande visant à interroger l’interprète ou le policier ayant témoigné avant le changement d’avocat n’a été présentée.

Législation interprétée : article 14 de la Charte canadienne des droits et libertés

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

Le fil RSS de la Cour d'appel vous permet d'être informé des récentes mises à jour.

Un fil RSS vous permet de vous tenir informé des nouveautés publiées sur un site web. En vous abonnant, vous recevrez instantanément les dernières nouvelles associées à vos fils RSS et pourrez les consulter en tout temps.


Vous cherchez un jugement?

Les jugements rendus par la Cour d'appel du Québec depuis le 1er janvier 1986 sont disponibles gratuitement sur le site internet de la Société québécoise d'information juridique (SOQUIJ): citoyens.soquij.qc.ca

Une sélection de jugements plus anciens, soit depuis 1963, est disponible, avec abonnement, sur le site internet de SOQUIJ: soquij.qc.ca