Cour d'appel du Québec

Procureur général du Québec c. Conseil de la magistrature du Québec

Morissette, Sansfaçon, Lavallée

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli une demande en sursis de l'exécution d'un avis de sélection de candidats à la fonction de juge. Rejeté.

Un différend entre l’appelant, le procureur général du Québec, et les intimés, dont le Conseil de la magistrature du Québec, concernant notamment l’exigence de la maîtrise ou de la connaissance de l'anglais pour certains postes de juge, a déclenché cette affaire. En février 2022, la Cour supérieure a conclu que l’article 7 du Règlement sur la procédure de sélection des candidats à la fonction de juge de la Cour du Québec, de juge d'une cour municipale et de juge de paix magistrat (RLRQ, c. T-16, r. 4.1) ne permettait pas au ministre de la Justice de s’immiscer dans la détermination des critères de sélection des candidats à la magistrature fixés selon l’article 25 de ce règlement. En mai 2022, le projet de loi 96 a été adopté, ayant notamment pour conséquence de neutraliser l’effet du jugement de février 2022. La Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français (L.Q. 2022, c. 14) est entrée en vigueur en juin 2022. Quelques mois après, les intimés ont déposé un pourvoi en contrôle judiciaire, invoquant une atteinte à l’indépendance judiciaire en raison de l’ingérence du ministre de la Justice dans la gestion administrative de la Cour du Québec. En parallèle, le ministre de la Justice a publié l’avis CQ-2022-175 (avis 175), visant à pourvoir un poste de juge à la Chambre de la jeunesse à Longueuil, lequel ne contenait aucune mention au sujet de la connaissance de l’anglais par d’éventuels candidats. Les intimés ont donc demandé l’annulation de l’avis 175 ainsi que le sursis de la procédure de sélection liée à celui-ci jusqu’au jugement au fond.

Une question sérieuse se pose quant à savoir si la secrétaire à la sélection des candidats à la fonction de juge pouvait passer outre à la demande de la juge en chef de la Cour du Québec portant sur les besoins de maîtrise ou de connaissance de l’anglais étant donné l'entrée en vigueur de la réforme 2 jours plus tard. Cette question met en cause l’articulation entre une mesure administrative de simple exécution et une demande légitime qu’une représentante autorisée du pouvoir judiciaire a adressée à l’Administration pour subvenir à certains besoins précis d’un tribunal judiciaire. Si la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français est applicable à l’avis 175, il y aura lieu de considérer la validité de la réforme de la procédure de sélection des candidats à la fonction de juge au regard des principes constitutionnels pertinents. L’indépendance judiciaire de même que les garanties linguistiques et la présomption de validité constitutionnelle des lois devront être abordées lorsque l’affaire procédera au fond. Il n’existe pas de raison impérative ou sérieuse pour remettre en question le sursis ordonné par le juge.

La réforme apportée par la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français est lourde de conséquences si elle s’applique aussi à l’avis 175. Plusieurs questions demeurent à résoudre au fond. Elles dépassent en importance et en complexité la question que suscite le besoin de pourvoir un poste de juge à la Chambre de la jeunesse dans le district de Longueuil. Le dossier de première instance contient une déclaration sous serment de la juge coordonnatrice responsable de la Chambre de la jeunesse qui décrit les effets négatifs de l’avis 175 sur l’administration de la justice s’il lui est donné suite. Ces éléments provenant de l’une des personnes les mieux placées pour évaluer la situation sont probants au point d’être concluants. Cela suffisait pour asseoir le jugement entrepris.

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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