Gagnon, Beaupré, Baudouin
Appel de jugements de la Cour supérieure ayant statué en matière d’autorisation d’exercer une action collective. Accueilli en partie. Requête verbale pour modifier un mémoire d'appel. Rejetée.
Les appelants ont introduit une action collective contre des transporteurs aériens ou des compagnies liées à la suite de l’annulation de billets d’avion ou de forfaits voyages en raison de la pandémie de la COVID-19. Les intimées ont ultérieurement annoncé la mise sur pied de programmes de remboursement volontaire.
Le juge de première instance a d’abord conclu que les différences majeures observées entre tous les tarifs, termes et conditions des services aériens offerts par les intimées faisaient échec à la détermination d’une question commune puisqu’une analyse de chacune des modalités serait nécessaire à la résolution du litige. Il a ensuite retenu que l’annonce de la mise en place de programmes de remboursement volontaire avait éteint la cause d’action des appelants et des membres putatifs à l’égard du remboursement de leur billet d’avion et que les appelants n’avaient donc plus de cause défendable à faire valoir à l’encontre des intimées.
En analysant sommairement les différences des multiples arrangements contractuels possibles entre les intimées et les membres du groupe, ainsi que les tarifs, termes et conditions soumis par les intimées et leur application, le juge a porté une trop grande attention aux éléments qui distinguaient les membres entre eux au détriment de la reconnaissance de questions communes susceptibles de faire avancer le règlement de l’action collective. Or, plusieurs questions identifiées par les appelants semblent répondre aux exigences énoncées à l’article 575 paragraphe 1 du Code de procédure civile (RLRQ, c. C-25.01) (C.P.C.) puisque la situation des intimées est somme toute assez similaire, étant des transporteurs aériens ou des compagnies liées ayant vendu des billets d’avion ou des forfaits voyages à des clients et ayant refusé de rembourser certains d’entre eux ou, à tout le moins, de payer les intérêts sur les remboursements accordés tardivement et sur les dommages allégués.
Quant à la suffisance des faits invoqués au soutien des conclusions recherchées, le juge a commis une erreur en concluant prématurément à l’extinction des causes d’actions des membres putatifs. En effet, il ne disposait d’aucun détail sur les programmes des intimées lui permettant d’affirmer avec certitude que l’ensemble des membres putatifs avaient été remboursés ou allaient effectivement l'être et que ces programmes les avaient tous désintéressés du recours. Par ailleurs, même s’il devait y avoir extinction du droit au remboursement du coût d’un billet d’avion ou d’un forfait voyage, cela n’aurait pas pour conséquence d’éteindre une réclamation relative aux intérêts résultant du retard des intimées à rembourser les sommes dues à compter de la demeure et aux dommages moraux et punitifs.
La poursuite de l’action collective dans ce contexte peut soulever un questionnement sur la proportionnalité du recours, mais il faut garder à l’esprit que le droit des actions collectives se soucie, dans son essence même, des petites réclamations, que l’action collective vise à dissuader les responsables éventuels de méconnaître leurs obligations et que le principe de la proportionnalité ne constitue pas une cinquième condition autonome de l’article 575 C.P.C. Or, la description du groupe doit être modifiée pour refléter le fait que les appelants n’ont pas démontré, même prima facie, l’existence d’un syllogisme juridique à l’égard d’une action collective de portée mondiale ou même nationale à l’encontre des intimées.
Enfin, il faut constater que l'appelant Lachaine n’a plus la capacité requise pour être en mesure d’assurer une représentation adéquate, ayant été remboursé par l’émetteur de la carte de crédit avec laquelle il avait acheté son forfait.
Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca