Thibault, Gagnon, Lavallée
Requête pour permission d’interjeter appel d’un jugement rectificatif de la Cour supérieure. Requête en déclaration d’abus de procédure et condamnation à des dommages-intérêts. Rejetées.
La juge de première instance a ordonné au requérant d’indemniser l’intimée et de lui rembourser la moitié de ses honoraires. Le requérant s’est vu refuser la permission d’appeler du jugement rendu. Il a ensuite volontairement omis d’exécuter le jugement, et l’utilisation inappropriée par la juge du mot « ordonne » au lieu du mot « condamne » dans les conclusions de nature pécuniaire du jugement en a empêché l’exécution forcée. L’intimée a donc demandé à la juge de rectifier son jugement, ce qu’elle a fait.
Le requérant allègue que la juge a erré en droit en rectifiant le jugement sans tenir une audience ni lui permettre de faire ses observations, violant ainsi la règle audi alteram partem. Pour sa part, l’intimée fait valoir que la requête du requérant est frivole de même que dilatoire et qu’elle s’inscrit dans une continuité d’abus de procédure.
La permission d’appel n’est pas accordée. Le juge qui est saisi d’une demande de rectification de la part d’une partie n’est pas tenu de tenir une audience en bonne et due forme avant de statuer sur la demande. En règle générale, il doit cependant permettre aux autres parties de présenter leurs observations. Or, l’omission de la juge de consulter le requérant n’a pas eu de conséquence, car celui-ci ne disposait d’aucun argument valable pour s’opposer à la demande de rectification. En outre, bien que la rectification ne puisse être demandée lorsque le jugement fait l’objet d’un appel, ce n’est pas le cas lorsque la permission d’appeler est refusée.
En ce qui concerne la demande de l’intimée, il faut d’abord déterminer si la Cour est compétente pour s’en saisir. Sous l’ancien Code de procédure civile (RLRQ, c. C-25), lorsque la Cour était saisie d’une pareille demande après avoir rejeté une requête pour permission d’appeler qui lui avait été déférée, elle n’avait pas cette compétence (Chabot c. Construction CAL inc. (C.A., 2013-05-27), 2013 QCCA 976, SOQUIJ AZ-50971846, 2013EXP-2035, J.E. 2013-1085). Or, l’arrêt Chabot n’est plus pertinent depuis l’adoption du nouveau Code de procédure civile (RLRQ, c. C-25.01) (C.p.c.) et, par conséquent, il doit être écarté. Lorsqu’elle est valablement saisie d’une requête pour permission d’appeler déférée par le juge unique en vertu de l’article 367 C.p.c. – une disposition qui n’avait pas d’équivalent sous l’ancien code – la Cour exerce une compétence qui lui est attribuée par la loi et qui l’autorise à prendre les mesures appropriées. L’une des mesures consiste à déclarer abusif un acte de procédure en vertu de l’article 51 C.p.c. En l’espèce, il n’est pas question d’un abus de procédure de la part du requérant. Le grief formulé avait un fondement, de sorte que la juge aurait dû consulter le requérant avant de rectifier son jugement.
Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca