Cour d'appel du Québec

Droit de la famille — 21919

500-09-028907-202

Marcotte, Gagné, Fournier

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant modifié le jugement de divorce des parties. Accueilli en partie.

En 2001, dans le consentement sur les mesures accessoires à leur divorce, le mari s’est notamment engagé à désigner l’épouse «bénéficiaire désignée irrévocable» de ses régimes enregistrés d’épargne-retraite en échange de la renonciation de celle-ci au partage en parts égales des REER en vertu des règles de partage du patrimoine familial. En 2002, le mari a appris qu’une telle désignation était impossible dans les formulaires bancaires. L’épouse a découvert ce fait en 2016 et elle a introduit une demande en modification des mesures accessoires pour obtenir le transfert des fonds enregistrés de revenus de retraite du mari en son nom (FERR), les REER de celui-ci ayant été convertis sous cette forme.

Le juge de première instance a annulé les clauses pertinentes du consentement après avoir conclu que l’engagement du mari était impossible à exécuter et que l’épouse n’aurait jamais accepté de renoncer au partage en parts égal des REER, au moment de conclure l’entente, si elle l’avait su. Il a aussi rejeté la suggestion du mari de prendre acte de son engagement à respecter le jugement de divorce et à céder le reliquat de ses FERR à l’épouse à son décès, comme il l’avait déjà prévu par disposition testamentaire. Il a ensuite ordonné le partage en parts égales de la valeur estimée des REER à la date d’introduction de la demande en divorce.

Le juge a commis une erreur révisable en déclarant, dans un premier temps, que l’exécution de l’engagement du mari était impossible de même qu’en rejetant son offre. La désignation ne pouvait se qualifier en l’espèce de donation à cause de mort puisqu’il s’agissait plutôt de la contrepartie à la renonciation de l’épouse au partage des REER du mari afin de permettre à ce dernier d’en bénéficier jusqu’à sa mort. Le consentement présentait un aspect transactionnel. L’erreur du juge l’a amené à commettre une seconde erreur, soit celle de modifier le jugement de divorce en annulant certaines clauses du consentement entériné par ce jugement, sans avoir été saisi d’une demande en rétractation en bonne et due forme et en temps utile. Il y a donc lieu d’infirmer la modification proposée en première instance et de rétablir le jugement de divorce.

Outre ces erreurs, le juge a refusé à tort de tenir compte de la contrepartie déjà versée à l’épouse, après avoir reconnu le droit de celle-ci de demander l’annulation des clauses. Le juge a ainsi puni le mari pour son omission de révéler à l’épouse pendant des années qu’il n’avait pas réussi à la désigner bénéficiaire irrévocable de ses REER dans ses formulaires bancaires. Sa décision paraît excessive et injustifiée. S’ajoute à cette injustice le fait que le juge a ordonné le versement de 290 000 $, correspondant à ce qu’il avait évalué arbitrairement être la moitié de la valeur des REER, et ce, sans égard à la dette fiscale qui devait être prise en considération au moment du partage. Enfin, si l’attribution de l’intérêt de l’indemnité additionnelle est discrétionnaire et s’impose généralement dans le contexte d’un jugement qui procède au partage du patrimoine familial, elle n’était pas indiquée en l’espèce puisqu’elle risquait d’entraîner un résultat injuste pour le mari. Cette attribution de l’intérêt de l’indemnité additionnelle est d’autant plus pénalisante du fait que le juge a déterminé que seules certaines clauses d’un consentement entériné par jugement, il y a près de 20 ans, devaient être annulées alors que d’autres clauses, qui y étaient pourtant reliées, ne l’étaient pas.

Texte intégral de l'arrêt: Http://citoyens.soquij.qc.ca

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