Cour d'appel du Québec

Ville de Montréal c. 9150-2732 Québec inc.

Mainville, Hamilton, Baudouin

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant condamné l’appelante à payer 1 989 398 $ en dommages-intérêts. Accueilli en partie.

En 2018, la ville appelante a lancé un appel d’offres en lien avec un contrat de transport de neige d’une durée de 5 ans. Avant la date limite de réception des soumissions, elle a entrepris des discussions avec Transvrac afin de connaître son intérêt à effectuer les travaux en question selon un contrat de gré à gré. Bien que l'intimée ait présenté la plus basse soumission conforme, le contrat a été accordé à Transvrac et l’appel d’offres a été annulé. La même situation est survenue en 2020. Le juge de première instance a conclu que la Ville ne pouvait négocier de gré à gré avec Transvrac de façon concomitante et parallèle à l’appel d’offres en cours. Elle devait choisir entre l’une de ces 2 voies. Il a accordé à l’intimée les profits anticipés pour la durée du contrat.

Lorsqu’une municipalité choisit de procéder par la voie d’un appel d’offres, elle se doit d’en respecter les règles fondamentales. En l'espèce, la Ville justifie sa décision de négocier un contrat de gré à gré avec Transvrac par le désir d’obtenir les meilleurs coûts possibles pour les travaux, mais cette préoccupation ne peut servir à éluder les règles de transparence et d’intérêt public qui régissent tout processus d’appel d’offres.

Par ailleurs, l’exception prévue à l’article 573.3 paragraphe 3 de la Loi sur les cités et villes (RLRQ, c. C-19) doit s’interpréter en fonction de l’ensemble des dispositions de la loi en matière d’attribution de contrats municipaux, suivant son objet et l’intention du législateur. L’un des objets importants du processus d’attribution des contrats municipaux par voie d’appel d’offres est de remplacer la négociation par la concurrence selon un processus public et transparent offrant une chance égale à tous les soumissionnaires. Or, à la lumière des travaux parlementaires, il n’a jamais été question de permettre aux municipalités de se prévaloir de l’exception prévue à l’article 573.3 paragraphe 3 de la loi afin de contourner les mécanismes relatifs aux appels d’offres. Le juge s'est donc bien dirigé en statuant que le fait de se prévaloir simultanément de 2 méthodes d’adjudication de contrat n’est manifestement pas compatible avec l’objet du processus d’appel d’offres public prévu par la loi.

En outre, le juge n’a pas commis d’erreur en faisant abstraction des prétentions de la Ville selon lesquelles elle aurait invoqué le droit du client à la résiliation unilatérale prévu à l’article 2125 du Code civil du Québec (L.Q. 1991, c. 64) dès la fin de la première année du contrat. D'une part, la Ville ne pouvait invoquer a posteriori la résiliation prévue à cet article. D'autre part, cette dernière n'a pas démontré qu’elle courait les risques associés à l’utilisation de cette disposition au simple motif que le contrat qui aurait alors été accordé à l’intimée dépassait le coût de ses estimations.

Quant au quantum, la Ville ne peut invoquer pour la première fois en appel le fait que l’intimée aurait failli à l’obligation de réduire ses dommages. Toutefois, puisqu’il est raisonnable, selon la preuve, de conclure que la perte subie se serait matérialisée au cours de l’année pendant laquelle les travaux ont été effectués, le juge a erré en accordant des intérêts et l’indemnité additionnelle sur des profits futurs à compter d’une date où une partie de ceux-ci ne se seraient pas matérialisés.

Législation interprétée : article 573.3 paragraphe 3 de la Loi sur les cités et villes

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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