Cour d'appel du Québec

Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 3333 c. Réseau de transport de Longueuil

Gagnon, Beaupré, Dumais (ad hoc)

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté un pourvoi en contrôle judiciaire d’une sentence d’un arbitre de griefs. Rejeté.

La convention collective accorde un congé d’assiduité aux salariés qui, durant une année de référence, ne se sont pas absentés à plus de 3\reprises ni pendant plus de 10 jours. Aux fins de la computation du nombre d’absences ou de jours d’absence, la convention exclut certains congés, mais pas les congés de maternité ou de paternité ni les congés parentaux. Saisi d’un grief à cet égard, l’arbitre a donné tort au syndicat, estimant que la parentalité n’était pas un motif de discrimination prohibé par la Charte des droits et libertés de la personne (RLRQ, c. C-12) et que, dans le cas du congé de maternité, les dispositions applicables de la convention n’avaient pas pour effet de compromettre le droit de la salariée à la reconnaissance et à l’exercice en pleine égalité de ses conditions de travail suivant les articles 10 et 16 de la charte québécoise.

Vu le principe du stare decisis vertical et contrairement à ce que soutient le syndicat, il n’existe pas de jurisprudence contradictoire sur la question de savoir si le motif de discrimination fondé sur l’«état civil» doit inclure la notion de «parentalité» ou de «situation parentale». En effet, l’arrêt Syndicat des intervenantes et intervenants de la santé Nord-Est québécois (SIISNEQ) (CSQ) c. Centre de santé et de services sociaux de la Basse-Côte-Nord (C.A., 2010-03-18), 2010 QCCA 497, SOQUIJ AZ-50618263, 2010EXP-1182, 2010EXPT-799, J.E. 2010-638, D.T.E. 2010T-215, [2010] R.J.D.T. 47, qui tranche cette question par la négative, n’a pas été contredit par la jurisprudence subséquente de la Cour (au contraire). Son enseignement semble plutôt avoir été mis en veilleuse par certaines décisions du Tribunal des droits de la personne. Dans un tel contexte, on ne peut reprocher à l’arbitre d’avoir préféré l’arrêt de la Cour à ces dernières. Certes, la Charte des droits et libertés de la personne commande une interprétation libérale, contextuelle, téléologique et cohérente avec les diverses lois fédérales et provinciales en matière de droits de la personne, à moins d'une intention contraire du législateur. À cet égard, il importe de prendre en compte que, contrairement à celle de l’article 15 (1) de la Charte canadienne des droits et libertés (L.R.C. 1985, app. II, no 44, annexe B, partie I), l’énumération des motifs de discrimination prohibés contenue à l’article 10 de la charte québécoise est exhaustive. On ne saurait donc l’interpréter de manière à y introduire des motifs de discrimination «analogues» à ceux énoncés, contrairement à son pendant fédéral, d’autant moins que le législateur provincial n’a pas retenu les propositions visant à inclure le mot «notamment» ou l'expression «situation de famille» dans l’énumération des motifs de discrimination illicites. Si le législateur ne parle pas pour ne rien dire, son silence ou son abstention peuvent aussi comporter leur part de signification.

Par ailleurs, la comparaison de la salariée en congé de maternité avec les salariés en congé de paternité ou en congé parental (dont l’exclusion n’est pas fondée sur un motif prohibé) mène à la conclusion que la première n’a pas été exclue en raison de sa grossesse, mais bien, comme le congé de paternité et le congé parental, en raison de la durée de ce congé et de l’objectif du congé d’assiduité. Dans un tel contexte, il y a absence de traitement discriminatoire. De toute façon, une analyse contextuelle, prenant notamment en compte les dispositions de la convention collective relatives aux «indemnisation et autres avantages» prévus dans le cas du congé de maternité, ne met pas en évidence que la salariée qui s’absente pour un tel congé subit un préjudice réel du fait qu’elle ne pourrait se prévaloir du congé d’assiduité.

Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca

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