Cour d'appel du Québec

Scene Holding Inc. c. Galeries des Monts inc.

Gagné, Lavallée, Baudouin

 

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté une demande en annulation d’une transaction ainsi qu'en réclamation de dommages-intérêts et recherchant des ordonnances injonctives. Rejeté.

En 2004, les parties ont conclu une transaction aux termes de laquelle l’intimée s’est engagée à décontaminer les eaux souterraines du site de l’appelante causée par la migration des contaminants provenant de son propre terrain. Elles ne s’entendent pas sur les contaminants visés par l’obligation de décontamination ni sur l’objectif à atteindre. L’appelante prétend aussi avoir subi un préjudice en raison du retard déraisonnable dans l’exécution des travaux.

Le juge de première instance a conclu que l’obligation de décontamination avait bel et bien été exécutée puisque seul le perchloroéthylène (PCE), par opposition à ses dérivés, était visé par la transaction. De plus, le seuil environnemental que les parties avaient convenu de respecter, soit celui de «Résurgence dans les eaux de surface ou infiltration dans les égouts» (RESIE), énoncé dans la Politique de protection des sols et de réhabilitation des terrains contaminés de 1998, était atteint, et ce, peu importe les modifications subséquentes de ce seuil. Enfin, malgré le retard de 5 ans pour atteindre l’objectif prévu à la transaction, le juge a retenu que l’appelante n'avait subi aucun préjudice.

Invoquant l’article 1425 du Code civil du Québec (L.Q. 1991, c. 64) et l’arrêt Uniprix inc. c. Gestion Gosselin et Bérubé inc. (C.S. Can., 2017-07-28), 2017 CSC 43, SOQUIJ AZ-51412992, 2017EXP-2143, [2017] 2 R.C.S. 59), l’appelante prétend que le juge devait conclure à l’ambiguïté des termes de la transaction et aller au-delà de ceux-ci pour rechercher l’intention commune des parties. Il en aurait alors considéré le contexte, en l’occurrence la difficulté pour l’appelante d’obtenir un financement hypothécaire depuis le début des années 2000 en raison des préoccupations de potentiels prêteurs quant aux risques environnementaux liés au site de sa propriété.

C’est à bon droit que le juge a conclu que le seul contaminant visé par l’obligation de décontamination était le PCE. Les parties savaient que celui-ci se transformerait en produits dérivés aussi considérés comme des contaminants. L’appelante n’a pas démontré que l’intention commune des parties était autre que celle exprimée au contrat. Le juge n’a pas non plus erré en concluant que la transaction ne visait pas une obligation de résultat, soit une remédiation complète de la contamination en vue de l’obtention d’un financement, contrairement à ce que soutient l’appelante.

D'autre part, la conclusion du juge selon laquelle la remédiation prévue dans la transaction consistait à ramener la concentration de PCE dans les eaux souterraines du site de l’appelante en deçà du critère RESIE prévu à la politique de 1998 n’est entachée d’aucune erreur révisable. Le juge n’a pas commis d’erreur en déterminant que les critères applicables à la décontamination du site de l’appelante sont ceux qui existaient au moment de la conclusion de la transaction. Les droits et les obligations découlant d’un contrat sont en effet fixés et cristallisés dès sa conclusion, de sorte que les droits et obligations des parties à un contrat sont en principe régis par la loi en vigueur au moment où il se forme. Pour qu’une loi nouvelle, entrée en vigueur après la conclusion du contrat, vienne modifier les droits et obligations des parties à un contrat, ces dernières doivent le prévoir clairement et de manière univoque dans celui-ci. Ce raisonnement s’applique d’autant plus en l’espèce que les critères contenus à la politique ne sont pas des normes légales. La cible à atteindre ne pouvait être mouvante, sauf si les parties l’avaient expressément prévu, ce qu’elles n’ont pas fait.

Enfin, le juge a eu raison d’affirmer que l’appelante n’avait pas démontré en quoi le retard de 5 ans dans l’atteinte de l’objectif de décontamination lui avait causé un préjudice.

 

Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca

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