Cour d'appel du Québec

Saitanis c. R.

Bich, Healy, Sansfaçon

 

Appel d’une déclaration de culpabilité. Rejeté.

Accusé de fraude, l’appelant, par l’intermédiaire de son avocat, a choisi de subir son procès devant un juge de la Cour du Québec après la tenue d’une enquête préliminaire. Deux mois plus tard, les parties ont convenu de conclure l’enquête préliminaire conformément à l’article 549 (1) du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46) (C.Cr.), renvoyant ainsi l’appelant à procès. Le 29 août 2019, lors d'une conférence de facilitation, l’avocat de l’appelant a informé la poursuite et le juge du fait que ce dernier entendait «réopter» pour un procès devant juge et jury conformément à l’ancien article 561 (1) b) C.Cr. La juge de première instance a rejeté cette requête parce que, selon elle, l'enquête préliminaire s'était terminée le 22 mai 2019 et que le délai de 15 jours alors prévu à cet article pour choisir un nouveau mode de procès avait expiré le 6 juin 2019. Après cette date, l'appelant ne pouvait réopter sans le consentement du poursuivant.

L’enquête préliminaire a bien pris fin le 22 mai 2019 après que l’appelant eut informé la Cour du Québec de sa décision, en application de l’article 549 C.Cr., de renoncer à terminer l’enquête préliminaire. Or, la décision de recourir à cette disposition entraîne des conséquences immédiates; elle met fin à l’enquête préliminaire. L’accusé est renvoyé à procès et le juge qui préside l’enquête devient dès lors functos officio et n’a plus compétence pour continuer. L’enquête préliminaire ne survit pas à la décision prise en vertu de l’article 549 et ne peut être maintenue provisoirement ou conditionnellement.

Toutefois, le droit de réopter à la fin de l’enquête préliminaire reste ouvert pour encore 15 jours en vertu de l’article 561 (1) b) C.Cr. Il ne s’agit pas d’une prolongation qui vise la durée de l’enquête préliminaire, mais qui vise uniquement le droit de choisir un nouveau mode de procès sans le consentement du poursuivant. En l'espèce, que l’appelant ait ou non droit à l’application rétroactive de la modification de l’article 561 C.Cr., entrée en vigueur le 19 septembre 2019, sa requête visant à choisir un procès devant juge et jury excède le délai permis applicable, que celui-ci soit de 15 ou de 60jours, puisqu’il a exprimé ce souhait plus de 90 jours après la fin de l’enquête préliminaire. Par ailleurs, l’appelant n’a relevé aucun élément abusif dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la poursuite de refuser sa demande de réopter.

La juge n’a pas non plus erré en décidant de recevoir en preuve plusieurs messages texte échangés après la période précisée dans l'acte d'accusation. Il n’existe aucune règle générale de droit selon laquelle la preuve obtenue après les faits est présumée irrecevable. En outre, ces messages confirment des actes malhonnêtes de supercherie et de dissimulation qui sont cohérents avec une conscience subjective de l’appelant que ses actions, à tout le moins, mettraient les intérêts pécuniaires des victimes en péril. Ils sont donc non seulement directement pertinents, mais ont également une grande valeur probante quant aux éléments constitutifs de la fraude.

Dans le présent cas, l’appelant n'établit aucune erreur dans la décision de la juge de ne pas exercer son pouvoir discrétionnaire pour exclure une preuve recevable, car il n’y avait pas de risque de préjudice qui contrebalançait la valeur probante des messages texte.

Enfin, il échoue à démontrer le caractère déraisonnable du verdict de culpabilité ou une interprétation erronée importante de la preuve qui pourrait être qualifiée d’erreur judiciaire.

 

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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