Cour d'appel du Québec

Promutuel Vallée du St-Laurent, société mutuelle d'assurance générale c. Noyrigat-Gleye

Schrager, Gagné, Moore

 

Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli une demande de type Wellington. Rejeté.

Le mis en cause a entrepris un recours contre les assurés intimés, leur reprochant d'avoir coupé des arbres, modifié le dénivellement du terrain et construit un mur de soutènement sur sa propriété. Il réclame des dommages compensatoires et punitifs en vertu de la Loi sur la protection des arbres (RLRQ, c. P-37), de même que des conclusions injonctives permanentes. La compagnie d'assurance appelante a accepté de prendre en charge la défense de ses assurés pour les dommages compensatoires, mais pas pour les demandes en injonction et en dommages punitifs.

L’obligation de défendre, prévue à l’article 2503 du Code civil du Québec (L.Q. 1991, c. 64) (C.C.Q.), laquelle est d’ordre public, s’enclenche dès lors que, sur la base de la nature véritable de la demande au terme d’une interprétation raisonnable des allégations, il existe une possibilité que l’assureur soit tenu d’indemniser l’assuré.

En l'espèce, l’appelante déforme le jugement de première instance lorsqu’elle prétend que le juge a conclu que la demande en injonction constituait un recours en dommages compensatoires. Celui-ci s'est plutôt limité à affirmer qu’«il n’est pas déraisonnable de conclure» ou qu’«il existe une possibilité» que la nature du litige consiste en la compensation d’un dommage matériel. Or, c’est bien là le critère qu’il devait appliquer.

D'autre part, l’injonction vise l’exécution d’une obligation de compenser un préjudice passé qui porte sur les mêmes faits constitutifs que la réclamation en dommages compensatoires et ne demandera pas de défense particulière. La nature véritable de l’action ne saurait dépendre uniquement du mode procédural d’exécution. Le mis en cause aurait pu faire évaluer les travaux et en demander les coûts afin d’exécuter ou de faire exécuter les réparations, comme il l’a fait pour le coût de remplacement des arbres, dont l’assureur ne conteste pas la couverture. Le fait que le mis en cause procède au moyen d'une injonction ne modifie donc pas la nature réelle du litige, qui est la compensation d’un préjudice matériel qu’aurait causé l’assuré.

Quant aux dommages punitifs, ils sont expressément exclus de la police d'assurance. Toutefois, l’obligation de défendre en matière d’assurance-responsabilité peut devoir imposer une exception au principe de l’unicité de représentation. À cet égard, le juge devra prendre en compte, notamment, l’unicité ou non des faits générateurs, l’importance, la connexité et la complexité de l’enjeu non couvert, la nécessité ou non d’une preuve propre à celui-ci, la proportion du litige qui portera sur l’enjeu non couvert ou encore le risque d’un conflit d’intérêts, le tout en fonction des principes directeurs du droit processuel. Il n’est pas question de créer une nouvelle obligation à l’assureur ou d’étendre le champ d’application de l’article 2503 C.C.Q. sur le fondement du principe processuel de la proportionnalité, ce qui ne saurait être, mais d’en aménager l'exécution, et ce, au profit de tous.

Dans le présent cas, le juge a constaté que les faits allégués qui sont couverts et ceux qui ne le sont pas soulèvent les mêmes questions et requièrent les mêmes moyens de preuve. En outre, la réclamation de dommages punitifs est marginale eu égard à l’ensemble du dossier et elle ne soulève ni question complexe ni preuve particulière. Le juge a donc eu raison, compte tenu de l’ensemble de ces circonstances, d’appliquer le principe de la proportionnalité et celui de l’unicité de la représentation et d’ordonner que l’avocat mandaté par l’assureur prenne en charge la défense portant sur la réclamation de dommages punitifs, étant entendu qu’il pourra, au terme du dossier, y avoir un partage des coûts.

 

Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca

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