Cour d'appel du Québec

Petit c. Gagnon

Doyon, Ruel, Kalichman

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté un pourvoi en contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision du Tribunal des professions. Rejeté.

L’appelant, un avocat déclaré coupable dans 7 dossiers disciplinaires, a fait valoir que certains aspects du régime de discipline professionnelle contrevenaient aux garanties d’indépendance et d’impartialité institutionnelles prévues à l’article 23 de la Charte des droits et libertés de la personne (RLRQ, c. C-12). La Cour supérieure a rejeté son pourvoi en contrôle judiciaire à l’encontre de la décision rendue par le Tribunal des professions, lequel a notamment rejeté les conclusions recherchées dans des avis d’intention d'invoquer l’inconstitutionnalité de dispositions du Code des professions (RLRQ, c. C-26) et du Code de déontologie applicable aux membres des conseils de discipline des ordres professionnels (RLRQ, c. C-26, r. 1.1).

Les conseils de discipline sont des organismes qui n’ont constitutionnellement aucune existence ou compétence autonome et ne font pas partie de l’ordre judiciaire. Afin de cerner les garanties d’indépendance et d’impartialité sur le plan structurel, il est nécessaire de les situer sur le spectre, le registre, la palette ou l’éventail des organismes administratifs. Pour ce faire, les critères contextuels retenus comprennent la nature de l’organisme, ses fonctions, ses attributs, son mode de fonctionnement, ses pouvoirs, ses compétences, le caractère final ou non de ses décisions, les parties touchées et la répercussion de ses décisions sur celles-ci ainsi que les intérêts en jeu, particulièrement à savoir si l’organisme tranche des litiges mettant en cause l’État contre des administrés.

C’est à tort que l’appelant affirme que les critères définis dans Québec (Procureure générale) c. Barreau de Montréal (C.A., 2001-09-05), SOQUIJ AZ-50099903, J.E. 2001-1710, D.T.E. 2001T-914, [2001] R.J.Q. 2058, ont été rejetés ou redéfinis par les arrêts Bell Canada c. Association canadienne des employés de téléphone (C.S. Can., 2003-06-26), 2003 CSC 36, SOQUIJ AZ-50180846, J.E. 2003-1227, D.T.E. 2003T-644, [2003] 1 R.C.S. 884, et Association des juges administratifs de la Commission des lésions professionnelles c. Québec (Procureur général), (C.A., 2013-10-02), 2013 QCCA 1690, SOQUIJ AZ-51006449, 2013EXP-3291, J.E. 2013-1791, [2013] R.J.Q. 1593. Ceux-ci ne font que réitérer l’importance d’une analyse contextuelle et globale pour déterminer le degré d’application des garanties d’indépendance et de l’impartialité structurelles des tribunaux et organismes administratifs.

En l’espèce, la Cour supérieure s’est livrée à cet exercice contextuel et ses conclusions sont correctes ainsi que conformes au droit. Les conseils de discipline ne se trouvent pas à l’extrémité du spectre justifiant l’application d’un haut degré d’indépendance et d’impartialité structurelles ni non plus à l’autre extrémité, comme étant étroitement associés aux fonctions exécutives de l’État, mais se situent plutôt au niveau intermédiaire. Le législateur possède une marge de manœuvre raisonnable pour aménager la composition, la nomination, la rémunération ou non, la formation et la révocation des membres. Il ne revient pas aux tribunaux de légiférer sur ces questions. Par ailleurs, l’appelant se méprend en affirmant que les garanties structurelles d’indépendance et d’impartialité administratives requièrent la rémunération des pairs siégeant aux conseils de discipline. Leur participation volontaire et bénévole est de nature non pas à diminuer, mais à renforcer leur indépendance. C’est à bon droit qu’ont été rejetés les autres arguments de l’appelant concernant la distinction entre les présidents et les pairs ainsi que l’absence de serment.

La structure des conseils de discipline, qui sont assujettis au Code des professions et à ses règlements d’application, offre des solides garanties d’indépendance et d’impartialité, compte tenu du positionnement des conseils sur l’éventail des tribunaux et organismes administratifs. Comme l’ont tranché les instances antérieures, il y a lieu de répondre par la négative à la question de savoir si une personne raisonnable et bien renseignée verrait les dispositions encadrant la participation des pairs comme une menace à leur indépendance ou à leur impartialité sur le plan structurel dans un grand nombre de cas.

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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