Cour d'appel du Québec

Les Investissements Laroda Inc. c. Ville De Sainte-Julie

Marcotte, Hogue, Moore

 

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté une demande en jugement déclaratoire et en réclamation de dommages-intérêts. Accueilli (287 459 $).

En 2001, une convention est intervenue entre la ville intimée et Les Promotions MG Larochelle inc. relativement à des terrains cédés en trop par le promoteur immobilier au titre de frais de parc. Il y a ainsi eu constitution d’une banque équivalant à la superficie excédentaire des terrains cédés. Celle-ci devait permettre à Larochelle de s’acquitter de son obligation de céder 10 % de la superficie des prochains terrains qu’elle exploitera en effectuant une compensation entre ce qu’elle devra alors céder et la superficie excédentaire qui sera accumulée dans cette banque. En 2015, ayant été dans l’impossibilité d’utiliser la banque, Larochelle a demandé à la Ville de lui présenter une offre pécuniaire, ce qui lui a été refusé. La juge de première instance a conclu que l'appelante, qui détient tous les droits, titres et intérêts que possédait auparavant sa société sœur Larochelle, ne pouvait exiger une compensation financière.

La juge a commis une erreur de droit en retenant que la transaction liant les parties emportait novation et éteignait l’obligation que la Ville pouvait avoir envers Larochelle de lui restituer ce qu’elle avait perçu en trop. Une transaction n’emporte pas nécessairement novation des obligations antérieures des parties. Encore faut-il que ce soit là leur intention. En l’espèce, les parties ont voulu reporter l’exigibilité de l’obligation qu’avait la Ville de remettre la superficie perçue en trop à un moment où Larochelle aurait de nouveau l’obligation de lui céder des terrains à des fins de parc, permettant alors aux parties de procéder par compensation plutôt que de forcer la Ville à emprunter les sommes nécessaires pour exécuter son obligation par équivalent. Les parties étaient alors convaincues que Larochelle procéderait à de nouveaux ensembles résidentiels et, ne percevant pas cet évènement comme étant incertain, elles voulaient soumettre l’obligation de la Ville à un terme non déterminé plutôt qu’à une condition. Il est en effet établi que l’incertitude objective d’un événement ne suffit pas pour faire de celui-ci une condition et qu’il faut également que les parties elles-mêmes ne l’aient pas tenu pour certain.

La juge a commis une autre erreur lorsqu’elle a déterminé que, s’il était question d’une obligation à terme et non d’une obligation conditionnelle, le recours était prescrit. En effet, elle ne pouvait conclure que l’obligation de la Ville devenait exigible dès lors que la Commission de protection du territoire agricole du Québec avait refusé la permission demandée de retirer de la zone agricole le terrain que Larochelle souhaitait exploiter puisque, ce faisant, elle a tout simplement fait abstraction des 2 autres cas de figure pouvant entraîner l’usage de la banque de terrains, lesquels demeuraient susceptibles de se réaliser. Ne sachant pas à quel moment l’obligation de la Ville pourrait être considérée comme devenue exigible dans ces circonstances, il était nécessaire de s’adresser au tribunal pour qu’un terme soit fixé afin que l’obligation, jusqu'alors suspendue, devienne exigible et que la prescription extinctive commence à courir. Comme le terme ne pouvait être fixé avant l’introduction de la demande, celle-ci n’était pas prescrite.

Enfin, l’exécution en nature étant impossible en l’espèce, il faut se placer au moment où Larochelle a cédé les terrains pour déterminer la valeur de ce que la Ville a reçu en trop et, partant, la somme qu’elle doit verser à l'appelante pour maintenant exécuter par équivalent son obligation de remettre ce trop-perçu (art. 1700 du Code civil du Québec (L.Q. 1991, c. 64)).

 

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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