Cour d'appel du Québec

Lemieux c. R.

Doyon, Marcotte, Healy

Requête pour permission d’interjeter appel de la peine. Accueillie. Appels de la déclaration de culpabilité et de la peine. Rejetés.

L’appelant a été déclaré coupable sous 1 chef d’accusation d’agression sexuelle à l’endroit de la conjointe d’un ami. Il s’est vu imposer une peine d’emprisonnement de 12 mois. L’appelant fait valoir que le juge de première instance a eu recours à des stéréotypes pour écarter son témoignage et retenir celui de la plaignante, et qu’il a erré lors de l’évaluation de la preuve. En ce qui concerne la peine, il est d’avis que le juge a commis des erreurs lors de l’évaluation des facteurs atténuants et aggravants. Il demande qu’une peine d’emprisonnement de 18 mois avec sursis lui soit imposée, compte tenu de la modification à l’article 742.1 du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46) survenue depuis le jugement.

La plaignante n’était pas dans un état pour être réceptive aux avances de l’appelant et encore moins pour y participer. Dans ce contexte, le juge n’a eu recours à aucun préjugé en rejetant le témoignage de l’appelant. Il a plutôt conclu que le comportement d’une personne dans la situation de la plaignante ne pouvait correspondre à celui décrit par l’appelant. Il lui revenait de départager les versions contradictoires concernant l’impossibilité physique pour l’appelant de forcer la plaignante à lui faire une fellation. Ainsi, le juge ne s’est pas livré à un exercice d’appréciation inégal et injuste envers ce dernier. Les contradictions entre le témoignage de la plaignante et celui de son conjoint ne concernent pas les éléments essentiels de l’infraction; elles sont sans importance. Le juge a appliqué les règles de droit appropriées et son appréciation de la preuve est exempte d’erreur révisable.

Selon l’arrêt R. c. R.A.R. (C.S. Can., 2000-01-31), 2000 CSC 8, SOQUIJ AZ-50068948, J.E. 2000-261, [2000] 1 R.C.S. 163, l’appelant peut maintenant demander l’emprisonnement avec sursis puisqu’il a droit au bénéfice de toute modification législative sur la peine en vigueur au moment de l’appel. Le juge de première instance n'a évidemment pas envisagé l’emprisonnement avec sursis, de sorte que la Cour doit le faire en exerçant son propre pouvoir discrétionnaire. Dans le cadre de cet exercice, elle doit faire preuve de déférence à l’égard des conclusions de fait du juge. Dans le présent cas, même si l’appelant n’a pas d’antécédents judiciaires, qu’il est un actif pour la société et qu’il jouit d’une situation familiale stable, l’incarcération s’impose étant donné que les objectifs de dénonciation et de dissuasion doivent primer. Les facteurs aggravants, soit les conséquences pour la victime ainsi que le fait que l’appelant a porté atteinte à son intégrité physique, sexuelle et psychologique, qu’il a exploité sa vulnérabilité et que ses gestes constituent un abus de confiance, ont un poids déterminant. L’emprisonnement avec sursis n’est pas approprié. Il peut avoir un effet dissuasif et dénonciateur, mais les circonstances d’une affaire peuvent requérir l’incarcération, comme en l’espèce.

Enfin, l’établissement d’outils de référence pour l’attribution d’un emprisonnement avec sursis est un exercice délicat puisque cette peine était prohibée depuis 2007. D'une part, l'utilisation des jugements rendus avant 2007 risquerait d’abaisser indûment la sévérité de la peine, compte tenu de l’évolution de la jurisprudence. Aujourd’hui, les peines peuvent être plus sévères. D'autre part, il serait tout aussi erroné de déterminer la peine en insistant indûment sur les peines infligées depuis 2007. Le changement législatif est trop récent pour cibler avec justesse les jugements pouvant servir à un exercice valable de comparaison en ce qui concerne l’emprisonnement avec sursis.

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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