Cour d'appel du Québec

Lehoux c. R.

Schrager, Ruel, Cournoyer

Appel d'un verdict de culpabilité. Accueilli; la tenue d'un nouveau procès est ordonnée.

L'appelant a été déclaré coupable sous 1 chef d'agression sexuelle au terme d'un procès devant jury. Le juge de première instance a formulé ses directives oralement au jury en matinée et les délibérations ont immédiatement débuté. En fin de journée, le juge a reçu une note du jury comprenant 2 questions. Celui-ci se demandait si une possibilité constituait une preuve et comment interpréter la réponse d’un témoin selon la nature des questions posées. L'appelant reproche au juge d'avoir fourni une réponse erronée et incomplète à ces questions.

La responsabilité du juge à l’égard des directives en général et des réponses aux questions du jury est exigeante, même si elle ne requiert pas la perfection, car c'est l’effet global des directives qui compte. Les directives répondant à une question du jury ont cependant une importance particulière puisqu'elles portent généralement sur un aspect important du raisonnement de ce dernier. Lorsque la question est ambiguë, le juge a le devoir de la faire clarifier par le jury avant d’y répondre; l’omission de le faire peut constituer une erreur révisable. Par ailleurs, la réponse communiquée au jury doit non seulement être correcte et complète, mais elle ne doit pas être improvisée, car elle doit être rédigée soigneusement et sans empressement.

En l'espèce, la réponse du juge était erronée puisque l’admission par un témoin de l’existence d’une possibilité, sans autre preuve pour l’enraciner, ne constitue pas un élément de preuve. Elle était en outre confuse en raison de la distinction faite par le juge entre la preuve d’un fait et la preuve d’une possibilité, la dernière étant selon lui une preuve «plus vague» mais, néanmoins une preuve dont il fallait tenir compte.

Le questionnement du jury exigeait une réponse correcte et complète, et celle-ci devait être ancrée concrètement dans les questions en litige qu'il devait résoudre. Dans le contexte de la présente affaire, le juge du procès devait expliquer que la réponse d'un témoin qui admet une possibilité qui lui est proposée par une question en contre-interrogatoire se distingue de la réponse qui adopte le fait proposé par une telle question, en précisant qu’une possibilité ne tient pas lieu de preuve. Il devait en outre répéter ses directives antérieures au jury, ce qu'il n'a pas fait.

La disposition réparatrice ne peut trouver application dans les circonstances étant donné qu'il est impossible d'évaluer l'effet de la réponse erronée donnée au jury sur le verdict. En effet, un accusé doit être acquitté si son témoignage est cru, si celui-ci soulève un doute raisonnable ou s’il existe un doute raisonnable à la lumière de l’ensemble de la preuve. Or, le doute raisonnable repose sur la preuve ou l’absence de preuve. Ainsi, toute question qui porte sur ce qui constitue une preuve est déterminante, de même que toute erreur à l’égard de celle-ci, particulièrement lorsque la preuve que doit évaluer le jury est contradictoire comme c'était le cas en l'espèce.

 

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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