Cour d'appel du Québec

Honeywell International inc. c. Bombardier inc.

Bich

Demande en permission d’appel de jugements de la Cour supérieure et en suspension des procédures. Accueille en partie. Demande d’intervention. Rejetée.

Les 2 jugements dont appel ont tranché la première phase d’une instance scindée. Dans le contexte d’un différend portant sur l’application d’une clause contractuelle du client le plus favorisé, le juge de première instance a d’abord reconnu le droit de l’intimée de procéder à un audit afin de vérifier le respect de cette clause par l’appelante. Il a ensuite établi les balises devant encadrer l'audit en question, dont la nomination d’un expert indépendant et des mesures strictes pour assurer la confidentialité des informations devant être recueillies. Selon l’appelante, en adoptant l’article 211 du Code de procédure civile (RLRQ, c. C-25.01) (C.P.C.), lequel prévoit que le droit d’appel des jugements prononcés sur le fond d’une instance scindée ne peut être exercé qu’une fois prononcé le jugement mettant fin à celle-ci, le législateur ne peut avoir voulu rendre théorique l’appel d’une partie exposée comme elle à une situation hautement préjudiciable, en l’occurrence la divulgation irréversible de renseignements commerciaux sensibles. Une cliente de l’appelante souhaite intervenir à l’appel proposé afin de soutenir la position de celle-ci, estimant ses propres droits compromis par les jugements entrepris.

La demande de permission d’appel est mal fondée. Le législateur est intervenu en juin 2023 pour modifier, avec effet immédiat, les règles régissant le droit d’appel applicable à une instance scindée. Le texte de l’article 211 C.P.C. est limpide et l’intention du législateur ne porte pas à interprétation. Aucun des arguments de l’appelante, dont ceux fondés sur l’application temporelle des lois, n’est susceptible de justifier que lui soit accordée la permission d’appeler du premier jugement. L’appelante peut bien penser que le législateur n’aurait pas dû réintroduire à l’article 211 C.P.C. le principe abandonné au moment de la réforme du Code de procédure civile de 2016 ou aurait dû constater que la solution adoptée peut entraîner des conséquences pernicieuses ou inattendues, cela n’autorise pas pour autant la Cour ou ses juges à déroger au texte en établissant, en vertu des pouvoirs généraux qui leur sont accordés par l’article 49 C.P.C., une exception que la loi ne prévoit pas. Il n’est pas possible non plus de contourner la règle en question en recourant à l’article 31 alinéa 2 C.P.C., lequel régit les appels de jugements rendus en cours d’instance et qui décident en partie du litige ou qui causent un préjudice irrémédiable à une partie.

De toute façon, les inconvénients majeurs qu'invoque l’appelante ne sont pas de la nature d’un préjudice irrémédiable (même s’ils pouvaient susciter l’inquiétude de ses autres clients) et n'entraînent pas d’injustice. En outre, il est inexact de prétendre, comme le fait l’appelante, que son appel des jugements entrepris sera théorique si son exercice doit être reporté.

Enfin, comme l’appel du second jugement tient principalement au caractère mal fondé du premier, la permission d’appel ne peut non plus être accordée à son égard. Dans un tel contexte, la demande d’intervention devient sans objet, sans compter son irrémédiable tardiveté. Il convient cependant d’ordonner la suspension des procédures de première instance de manière à ne pas compromettre la possibilité pour l’appelante de s’adresser à la Cour suprême du Canada.

Législation interprétée: article 211 C.P.C.

 

Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca

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