Cour d'appel du Québec

Homsy c. Google

Morissette, Sansfaçon, Lavallée

 

Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté une demande d'autorisation d'exercer une action collective contre l'intimée. Accueilli; le dossier est retourné au juge de première instance afin qu’il tranche la demande.

L'appelant reproche à l'intimée d'avoir violé le droit à la vie privée et à l'inviolabilité des membres du groupe en procédant à l'extraction, à la collecte, à la conservation et à l'utilisation de leurs données biométriques faciales par l'intermédiaire de l'application Google Photos sans fournir de préavis suffisant, ni obtenir un consentement éclairé, ni publier de politiques de conservation des données biométriques, soit des exigences prévues dans la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (RLRQ, c. P-39.1).

M. le juge Morissette: L’étape de l’autorisation d'une action collective est un simple mécanisme de filtrage. À ce stade, la partie en demande aura gain de cause sur l’autorisation si elle satisfait au fardeau réduit qui est le sien, soit un «simple fardeau de “démonstration” du caractère soutenable du “syllogisme juridique”» (L'Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal c. J.J. (C.S. Can., 2019-06-07), 2019 CSC 35, SOQUIJ AZ-51602220, 2019EXP-1580, [2019] 2 R.C.S. 831, paragr. 58). En analysant le syllogisme juridique sous cet angle, les faits allégués dans la demande doivent être tenus pour avérés. Quant aux pièces produites au soutien des allégations, elles ont pour seul but d’étayer le caractère soutenable des prétentions et elles ne servent aucunement à établir l’existence de quelque fait que ce soit.

La jurisprudence récente démontre des indices d’une évolution favorable à une atténuation des exigences préalables à l’obtention d’une autorisation d’exercer une action collective. Si les faits allégués sont suffisamment clairs et précis, la partie en demande est ainsi dispensée de fournir une «certaine preuve» au soutien de ce qu’elle allègue.

M. le juge Sansfaçon: Les faits allégués quant à l’existence du programme Google Photos et de sa fonctionnalité de captage des données biométriques permettant de regrouper les photographies de personnes en fonction de leurs caractéristiques faciales sont suffisamment précis pour satisfaire au fardeau de démonstration requis. Par ailleurs, la pièce tirée du site Internet de l’intimée et reproduite dans la demande en autorisation par l'appelant au soutient de sa cause d'action décrit en des termes suffisamment clairs le fonctionnement de cette fonctionnalité. L'appelant n'avait pas à s'acquitter du fardeau que lui a imposé le juge de première instance de démontrer le mode de fonctionnement du programme et des algorithmes derrière l’application.

La conclusion selon laquelle le juge de première instance a erré en concluant à l'absence de cause défendable quant à l’extraction, la collecte, la conservation et l’utilisation de données biométriques faciales suffit à régler le sort de l'appel. Le dossier doit cependant être retourné à ce dernier afin qu'il en décide puisque l'un des éléments cruciaux du syllogisme juridique proposé par l’appelant n’a pas été analysé ni tranché. En effet, ce ne sont pas l’extraction, la collecte, la conservation et l’utilisation de données biométriques faciales qui sont reprochés à l'intimée, mais plutôt l'obtention de ces données sans l’autorisation expresse des utilisateurs de même que de celle des personnes qui ont été photographiées et dont les données biométriques faciales se retrouvent dans les serveurs de l'intimée.

Législation interprétée: Article 575 paragraphe 2 C.P.C.

 

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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