Cour d'appel du Québec

Guilbeault c. R.

Gagné, Cotnam, Cournoyer

 

Appel d'un jugement de la Cour du Québec ayant déclaré l'appelant délinquant dangereux et l'ayant condamné à une peine d'emprisonnement d'une durée indéterminée. Accueilli.

En 2013, l’appelant a été condamné à 5 ans d’emprisonnement pour voies de fait graves et a été désigné «délinquant à contrôler». Une ordonnance de surveillance de longue durée a alors été rendue pour une durée additionnelle de 5 ans. Après le début de l’ordonnance de surveillance, l’appelant a été arrêté et il a ensuite plaidé coupable à une série d’infractions, dont certaines assujetties aux dispositions du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46) applicables en matière de délinquant dangereux. À l’étape de déterminer la peine à imposer quant à ces dernières infractions, la juge de première instance a estimé qu’il n’existait pas de possibilité réelle que le risque de récidive que présentait par l’appelant soit maîtrisé au sein de la collectivité, d’où l’ordonnance d’incarcération pour une durée indéterminée faisant l’objet du présent appel.

Pour parvenir à sa conclusion, la juge s’est fortement appuyée sur une preuve par ouï-dire, soit le contenu d’un rapport d’évaluation du service correctionnel reçu en preuve après une réouverture d’enquête. La documentation provenant de ce dernier doit être traitée avec la même prudence que celle recommandée dans R. v. Williams (C.A. (Ont.), 2018-05-10), 2018 ONCA 437, SOQUIJ AZ-51493134, à l’égard des synopsis de police. Puisque l'appelant a contesté les facteurs aggravants contenus dans ce rapport et l'opinion qui y est exprimée, il incombait à la poursuite d'établir leur existence hors de tout doute raisonnable. Or, au-delà du dépôt de sa requête, du rapport d’évaluation et d'une plaidoirie sommaire, la poursuite n'a pas tenté de le faire et, de plus, elle n’a pas semblé se soucier de la nécessité de s'acquitter du lourd fardeau de la preuve. Le jugement entrepris ne contient aucune conclusion précise sur les facteurs aggravants contestés. Or, la souplesse en matière de recevabilité de la preuve lors de la détermination de la peine ne doit pas être interprétée comme un allègement du fardeau de la poursuite: tous les facteurs aggravants doivent être prouvés hors de tout doute raisonnable. En outre, la juge aurait dû tirer des conclusions précises sur les éléments de preuve qui indiquaient des progrès de la part de l'appelant, soit un délinquant souffrant de problèmes de santé mentale qui l'ont conduit à une tentative de suicide pendant son incarcération et à de multiples épisodes d'automutilation. Dans un tel contexte, le jugement ne peut être maintenu. La tenue d'une nouvelle audience doit être ordonnée. Il s’agit de la seule solution équitable pour l'appelant et la poursuite.

 

Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca

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