Cour d'appel du Québec

Gestion ITR inc. c. Intact Compagnie d'assurance

Mainville, Gagné, Beaupré

 

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli une demande d’indemnisation liée à des cautionnements. Demande de bene esse pour permission d’interjeter appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté et déclaré abusive une demande en dommages-intérêts. Rejetés. 

À l’époque du litige, l’intimée fournissait divers cautionnements aux appelantes en contrepartie de la signature de conventions d’indemnisation. À la demande de l’une des appelantes, un avenant a été souscrit pour ajouter Limestone Development LLC à titre de débiteur principal. N’ayant pas l’autorisation de délivrer des contrats de cautionnement aux États-Unis, l’intimée a conclu une convention de réassurance avec Hartford Fire Insurance Company afin de fournir des cautionnements au bénéfice de Limestone pour 2 projets de construction, et ce, à la connaissance des appelantes. À la suite de réclamations de sous-traitants impayés par Limestone, Hartford s’est fait rembourser par l’intimée, qui s’est ensuite fondée sur la convention d’indemnisation pour réclamer ces sommes aux appelantes. La juge de première instance a déterminé que la convention de réassurance intervenue entre l’intimée et Hartford n’était pas un contrat de réassurance, mais plutôt une entente commerciale, et que le droit d’action de l’intimée prenait sa source dans la convention d’indemnisation. Selon la juge, l’engagement fondamental des appelantes consistait à rembourser l’intimée en cas de perte causée par des cautionnements fournis à sa demande.

La juge n’a pas erré en concluant que le droit d’action de l’intimée prenait sa source dans la convention d’indemnisation, dont la définition de «cautionnements» est très large et permet d’englober les cautionnements fournis par cette dernière ou par toute autre caution procurée par elle, en l’occurrence Hartford. Limiter les droits de l’intimée aux seuls cautionnements fournis par elle, comme le propose les appelantes, irait à l’encontre de l’économie de la convention d’indemnisation. Les cautionnements souscrits par Hartford pour les 2 projets de Limestone aux États-Unis sont couverts par la convention d’indemnisation, et ce, même s’ils n’ont pas été fournis par l’intimée. Celle-ci a donc le droit d’être indemnisée par les appelantes pour toute perte ou dommages qu’elle a subis par suite de la souscription de ces cautionnements.

La question de savoir si la juge a commis une erreur de droit en interprétant la convention de réassurance intervenue entre l’intimée et Hartford comme une simple entente commerciale, neutralisant ainsi l’article 2397 du Code civil du Québec (L.Q. 1991, c. 64) (C.C.Q.), paraît superfétatoire. Même si cette convention était un contrat de réassurance, cette disposition ne ferait pas échec au recours de l’intimée fondé sur la convention d’indemnisation (Boiler Inspection and Insurance Company of Canada c. H.A. Simons Ltd. (C.A., 2011-06-23), 2011 QCCA 1194, SOQUIJ AZ-50763357, 2011EXP-2133, J.E. 2011-1164). Les appelantes s’étant engagées à indemniser l’intimée, le fait que cette dernière ne soit pas subrogée légalement dans les droits de Hartford n’y changerait rien.

Par ailleurs, la Cour ne croît pas qu’un contrat de réassurance au sens de l’article 2397 C.C.Q. peut avoir pour cause un contrat de cautionnement. En droit civil québécois, le contrat de cautionnement et le contrat d’assurance sont distincts et ne répondent pas aux mêmes règles. Le seul fait que des compagnies de garantie recourent à la réassurance pour limiter leurs risques ne fait pas en sorte que l’article 2397 C.C.Q. s’applique en matière de cautionnement. En outre, le fait que c’est le réassureur (l’intimée) qui paie un «bond fronting fee» au réassuré (Hartford) pour que celui-ci fournisse des cautionnements, et non l’inverse, convainc la Cour que l’intimée n’est pas le réassureur de Hartford au sens où l’entend le droit des assurances. La Cour partage donc l’opinion de la juge selon laquelle, malgré son titre, la convention de réassurance intervenue entre l’intimée et Hartford n’est pas un contrat de réassurance au sens de l’article 2397 C.C.Q.

 

Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca

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