Cour d'appel du Québec

Gauthier c. R.

Gagnon, Marcotte, Healy

 

Appel de déclarations de culpabilité. Rejeté. Requête pour permission d’interjeter appel de la peine. Accueillie. Appel de la peine. Accueilli en partie.

L’appelant, un membre des Hells Angels, a été déclaré coupable de trafic de stupéfiants au profit d’une organisation criminelle, de complot, de trafic de stupéfiants et de recel. Le juge de première instance a apprécié une preuve circonstancielle dont les assises comprennent notamment une preuve d’expert, de l’écoute électronique, des enregistrements vidéo et une preuve factuelle objective. Il en a tiré différentes inférences et a considéré que la seule conclusion raisonnable résidait dans la culpabilité de l’appelant. Il l’a ainsi condamné à une peine de 9 ans d’emprisonnement, de laquelle il a retranché 1 291 jours en raison de sa détention provisoire, y compris un «crédit Covid supplémentaire» de 2 jours pour chaque jour passé sous garde, pour un total de 195,5 jours.

Déclarations de culpabilité 

L’inférence de fait selon laquelle Facchino, le gestionnaire du réseau de trafiquants et un aspirant membre des Hells Angels, remettait régulièrement de l’argent à l’appelant, est raisonnable, et ce, même si la perquisition effectuée à son domicile n’a pas permis de trouver l’argent. Le juge pouvait également raisonnablement inférer que de l’argent provenant du trafic de stupéfiants était caché quelque part dans la maison de l’appelant. Étaient également raisonnables les inférences d’un contrôle du territoire de la ville par les Hells Angels, de l’existence d’une relation hiérarchique entre Facchino et l’appelant, de la façon de fonctionner de l’organisation, de l’état d’esprit de méfiance de l’appelant révélé par sa façon de placer les élastiques pour retenir les liasses d’argent, de son intérêt pour la collecte de preuves dans une autre enquête criminelle et du fait qu’il a adopté le comportement d’une personne qui se sait surveillée. Ces inférences pouvaient légitimement être retenues dans l’analyse de la preuve circonstancielle.

Par ailleurs, les mots «semble démontrer» employés une seule fois au stade de l’analyse, bien qu'ils soient malheureux, n’ont eu aucune conséquence sur les verdicts. Quant à l’absence de preuve directe montrant Facchino remettre de l’argent à l’appelant, elle est largement comblée par: 1) une preuve d’expert dont les principales conclusions ont été acceptées par le juge, y compris celles portant sur les façons de faire des Hells Angels; 2) la preuve de l’appartenance de l’appelant à cette organisation; 3) la preuve de rapports étroits et soutenus entre l’appelant et Facchino; 4) la preuve des activités criminelles de Facchino; et 5) les inférences logiques et rationnelles selon lesquelles un aspirant membre des Hells Angels comme Facchino ne peut s’adonner au trafic de stupéfiants sur un territoire au vu et au su de ses membres, et ce, dans l’indifférence de l’appelant, lui-même membre des Hells Angels. Ainsi, la conclusion finale du juge selon laquelle la seule inférence raisonnable est celle de la culpabilité de l’appelant est raisonnable et donc inattaquable en appel.

Peine 

Il importe de ne pas confondre les facteurs pertinents relativement à la détermination de la peine avec les circonstances qui permettent l’application d’un crédit pour fixer la durée effective de la peine à infliger. Le juge ne peut accorder une valeur chiffrée à des facteurs pertinents pour ensuite se livrer à un exercice mathématique de soustraction et d’addition dans le but de déterminer une peine juste et indiquée. De plus, le fait de quantifier tous les facteurs atténuants, aggravants et pertinents est contraire à l’esprit même du processus de détermination de la peine.

En l’espèce, le «crédit Covid supplémentaire» consenti par le juge n’intervient qu’au stade de l’infliction de la peine et non à l’étape de sa détermination. Or, le juge ne pouvait consentir un crédit dépassant le plafond prévu à l’article 719 (3.1) du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46) de 1 jour 1/2 pour chaque jour passé sous garde. Il convient donc de casser ce crédit.

 

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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