Cour d'appel du Québec

Dydzak c. Zardev inc.

Vauclair, Lavallée, Buchholz (ad hoc)

 

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté une demande en jugement déclaratoire. Accueilli en partie.

Les appelants sont propriétaires de 40 lots bordant 3 lacs navigables et flottables. À la suite de la rénovation cadastrale, ils ont découvert qu’ils n’étaient pas propriétaires d’une bande de terre submergée faisant le tour du lac et se trouvant en front de leurs lots respectifs. La question en litige consiste à déterminer si la juge de première instance a erré en concluant que, lorsque l’auteur de l’intimée a vendu des propriétés subdivisées «bornées au lac», cette borne correspondait à la ligne des hautes eaux modifiées à la suite du rehaussement du niveau des lacs découlant de la construction d’un barrage, plutôt qu'en concluant qu'elle correspondait à la ligne des hautes eaux naturelles. 

La juge a commis une erreur manifeste et déterminante en assimilant la bande de terre submergée au lit du cours d’eau. En effet, puisque le niveau du lac n’était pas rehaussé au moment de la concession initiale qui a fait passer les terrains du domaine public au domaine privé et que la détermination de la ligne des hautes eaux au sens de l’article 919 du Code civil du Québec (L.Q. 1991, c. 64) (C.C.Q.) se fait au moment de cette concession, le lit du cours d’eau débute là où se trouvait la ligne des hautes eaux naturelles.

La juge a également erré en concluant que, dans le cas d’un cours d’eau navigable, la théorie de l’accessoire ne s’applique que si elle coïncide avec l’intention commune des parties mentionnée expressément dans l'acte de vente. Au contraire, c'est justement quand il n'y a aucune mention excluant expressément une grève, une batture ou le lit d’un cours d’eau dans les actes de vente subséquents à la concession initiale qui les a fait passer du domaine public au domaine privé que la théorie de l’accessoire peut jouer son rôle, et ce, peu importe s’il s’agit d’un cours d’eau navigable ou d’un cours d’eau non navigable.

En l'espèce, l’application de la théorie de l’accessoire fait en sorte que l’on présume que l’auteur de l’intimée avait l’intention de céder le lot riverain comprenant la portion submergée. En se fondant sur l'arrêt Administration portuaire de Québec c. Thibeault (C.A., 2018-01-22), 2018 QCCA 72, SOQUIJ AZ-51460316, 2018EXP-156, il y a lieu de conclure que, sans mention expresse dans les actes de vente des appelants ou de leurs auteurs indiquant que le vendeur s’est réservé la bande submergée, celle-ci doit être comprise dans le lot riverain cédé, en tant qu’accessoire de ce lot. Les termes «borné par le lac» stipulés dans les actes de vente font référence à la rive existante avant la construction du barrage, de sorte que l’étendue du droit de propriété des appelants se termine à la ligne des hautes eaux naturelles, soit au lac avant rehaussement.

Enfin, il n’y a pas lieu de de prononcer la conclusion visant à ce qu’il soit déclaré que les lots créés en marge de la rénovation cadastrale et attribués à l’intimée l’ont été sans droit et au détriment des appelants. En effet, cette conclusion laisserait entendre que c’est la rénovation cadastrale qui est à l’origine de la situation que contestent ces derniers, alors qu’il n’en est rien. La constitution du cadastre ne peut conférer de droits de propriété, et l’intimée ne peut tirer avantage de l’article 3027 C.C.Q., qui prévoit une présomption d’exactitude du cadastre puisque cette présomption est réfragable et qu’elle est en l'espèce repoussée par l’application de la théorie de l’accessoire.

 

Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca

Le fil RSS de la Cour d'appel vous permet d'être informé des récentes mises à jour.

Un fil RSS vous permet de vous tenir informé des nouveautés publiées sur un site web. En vous abonnant, vous recevrez instantanément les dernières nouvelles associées à vos fils RSS et pourrez les consulter en tout temps.


Vous cherchez un jugement?

Les jugements rendus par la Cour d'appel du Québec depuis le 1er janvier 1986 sont disponibles gratuitement sur le site internet de la Société québécoise d'information juridique (SOQUIJ): citoyens.soquij.qc.ca

Une sélection de jugements plus anciens, soit depuis 1963, est disponible, avec abonnement, sur le site internet de SOQUIJ : soquij.qc.ca