Cour d'appel du Québec

Drummond c. R.

Schrager, Healy, Gagné

 

Appel d’une déclaration de culpabilité. Rejeté, avec dissidence.

L’appelant a été déclaré coupable sous des chefs d’accusation de contacts sexuels et d’exhibitionnisme commis à l’endroit d'une enfant âgée de 7 ans. Comme l’événement a eu lieu aux États-Unis, l’appel porte notamment sur la question de savoir si le procureur général du Canada a consenti aux procédures engagées contre l'appelant conformément à l’article 7 (4.3) du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46) (C.Cr.). L’appelant fait valoir que le consentement écrit préalable de ce dernier était nécessaire, de sorte que les chefs d’accusation sont nuls, tout comme les déclarations de culpabilité.

Cette disposition mentionne le «procureur général», terme qui est défini à l’article 2 C.Cr. La définition générale qui s’y trouve s’applique au Code criminel tout entier, sauf si un élément vient limiter son sens. Par conséquent, si le texte n’exige pas le consentement personnel du procureur général ou ne limite pas expressément les pouvoirs de ses substituts, cette définition générale trouve application. Le «procureur général» dont il est question à l'article 7 (4.3) C.Cr. renvoie donc au procureur général du Québec (PGQ) et comprend son «substitut légitime».

Pour déterminer qui est un substitut légitime, il faut se reporter à la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales (RLRQ, c. D-9.1.1), dont l’article 1, lequel indique que le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) est le substitut légitime du PGQ, tout comme les poursuivants sous son autorité. L’article 16 de la loi autorise le DPCP à déléguer ses fonctions, tout en soulignant que les attributions réservées au sous-procureur général par le Code criminel ne peuvent être déléguées qu’à un directeur adjoint. Or, les attributions dont il est question aux présentes en vertu de l’article 7 (4.3) C.Cr. sont celles du «procureur général». Ainsi, l’article 16 de la loi ne contredit pas son article 1, selon lequel les poursuivants sont les substituts légitimes du PGQ.

Par conséquent, lorsque le DPCP, ou tout poursuivant autorisé à agir en son nom, autorise une poursuite, il va de soi qu’il consent à celle-ci. Ce consentement implicite vaut également pour chacun des procureurs aux poursuites criminelles et pénales du bureau du DPCP qui, selon les articles 1 et 25 de la loi, sont aussi les substituts légitimes du PGQ. Puisqu’il ressort clairement d’une lecture de cette loi que chacun des poursuivants sous l’autorité du DPCP est un substitut légitime du PGQ, le DPCP n’a pas à consentir personnellement et expressément aux procédures. Enfin, l’article 7 (4.3) C.Cr. n’exige pas que le consentement soit constaté par écrit.

Quant aux moyens d’appel sur le fond, les motifs du juge ne laissent entrevoir aucun signe de spéculation relativement au témoignage principal de la victime sur les attouchements sexuels ou l’exhibitionnisme. Il a suffisamment expliqué son appréciation de la preuve et le fondement de ses conclusions. Par conséquent, la Cour ne peut conclure que les déclarations de culpabilité sont déraisonnables, entachées d’une erreur ou qu’elles constituent par ailleurs un déni de justice.

Pour sa part, le juge Healy aurait accueilli l’appel car, selon lui, si l’autorisation d’un représentant du PGQ suffisait pour répondre à l’exigence prévue à l'article 7 (4.3) C.Cr., les mots mentionnés dans celui-ci qui exigent le consentement du PGQ seraient inutiles. Par ailleurs, cette thèse est inconciliable avec l’évolution du droit sur la conduite des poursuites pénales, le sens des mots et notamment la distinction entre la définition du «procureur général» et celle du «poursuivant» (art. 2 C.Cr.), et les principes de politique législative. En outre, seul un texte législatif explicite pourrait appuyer la conclusion voulant que le consentement de n'importe quel poursuivant suffise lorsque le Code criminel exige expressément le consentement du PGQ. Ainsi, une condition préalable à ce que la poursuite soit autorisée n’a donc pas été respectée et le procès s’est déroulé sans la compétence requise.

Législation interprétée: article 7 (4.3) C.Cr.

 

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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