Cour d'appel du Québec

Commission des services juridiques c. Bérubé-Bouchard

Marcotte, Schrager Cournoyer

 

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli une demande en rejet d’un pourvoi en contrôle judiciaire. Accueilli. Demande en rejet. Rejetée.

L’avocat intimé a soumis un différend quant à ses honoraires relatifs à un arbitrage suivant l’article 70 alinéa 3 de l’Entente entre le ministre de la Justice et le Barreau du Québec concernant le tarif des honoraires et les débours des avocats rendant des services en matières criminelle et pénale et concernant la procédure de règlement des différends (RLRQ, c. A-14, r. 5.2). L’appelante s’est pourvue en contrôle judiciaire de la sentence arbitrale rendue et l’intimé a présenté une demande en rejet au motif qu’il n’était pas possible de procéder à un contrôle judiciaire de la sentence arbitrale.

Le juge de première instance a retenu que l’arbitrage prévu dans l’entente était consensuel - l’arbitrage n’était pas obligatoire, les parties ayant la faculté d’y renoncer -, et non statutaire. Par conséquent, le seul recours de celui qui voulait contester la sentence arbitrale était la demande en annulation, et non le pourvoi en contrôle judiciaire.

Il existe 2 mécanismes d’adjudication non judiciaires, soit les processus dont ont convenu les parties dans une clause compromissoire prévue à l’article 2638 du Code civil du Québec (L.Q. 1991, c. 64) et ceux qui sont obligatoires et imposés par la loi. Si le mécanisme est consensuel, alors la décision qui en résulte ne pourra être revue par une cour de justice que dans le recours en homologation des articles 645 et ss. du Code de procédure civile (RLRQ, c. C-25.01), et non pas par voie de contrôle judiciaire en vertu des articles 529 et ss. Tant que l’arbitrage n’est pas obligatoire comme seul mécanisme de résolution des conflits, celui-ci doit être qualifié de consensuel même s’il est prévu par la loi.

En l’espèce, même si l’article 70 alinéa 1 de l’Entente entre le ministre de la Justice et le Barreau du Québec concernant le tarif des honoraires et les débours des avocats rendant des services en matières criminelle et pénale et concernant la procédure de règlement des différends prévoit que l’avocat insatisfait «peut» soumettre un différend à l’arbitrage, c'est en fait le seul recours possible vu l’article 73 alinéa 1. Il s’agit de ce que la doctrine appelle une clause de compétence exclusive, qui est couplée à l’alinéa 2 à une clause privative. Il est donc acquis que la clause de compétence exclusive prend son effet textuel: elle exclut tout autre tribunal et contribue à favoriser le mécanisme de règlement de différends simplifié et à canaliser tous les désaccords que les parties peuvent avoir dans un seul recours.

Le fait que l’entente est le résultat de négociations entre le ministre de la Justice et le Barreau du Québec, dont l’intimé est membre, ne fait pas de l’arbitrage un arbitrage contractuel ou consensuel pour autant. Il ne s’agit pas d’une entente entre l’appelante et l’avocat insatisfait des honoraires payables, mais bien d’un texte de nature réglementaire dont les termes sont imposés à l’avocat insatisfait d’une décision d’un organe administratif, de droit public, soit l’appelante. La Loi sur l’aide juridique et sur la prestation de certains autres services juridiques (RLRQ, c. A-14) décrète que l’entente a force de loi et les dispositions de l’entente ne permettent pas aux parties de se soustraire au mécanisme de l’arbitrage.

Le juge a donc commis une erreur de droit dans son interprétation de l’entente. Par ailleurs, la source du litige étant une décision d’un organisme administratif, sur le plan constitutionnel, il y a ouverture à un contrôle judiciaire éventuel par la Cour supérieure.

 

Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca

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