Cour d'appel du Québec

Brodeur c. R.

Doyon, Baudouin, Kalichman

 

Requête pour permission d’interjeter appel d’une déclaration de culpabilité. Accueillie. Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté une requête en arrêt des procédures pour cause de provocation policière. Rejeté.

Dans le cadre d’une opération policière, la police a publié des annonces fictives sur 4 sites Internet offrant des services d’«escortes». Le texte des annonces utilisait des termes comme «jeune débutante», «jeune beauté» et «petite». L’appelant a répondu à l'une des annonces et a appris de la personne-ressource (une agente d’infiltration) que les services concernaient des filles de 16 ans. Lors du rendez-vous planifié, il a été arrêté par les policiers. Il a été déclaré coupable d’avoir communiqué avec une personne en vue d’obtenir les services sexuels d’une personne mineure moyennant rétribution. Il se pourvoit à l'encontre du jugement rendu par la suite, lequel a rejeté sa requête en arrêt des procédures pour cause de provocation policière. Les moyens invoqués par l’appelant portent sur la question des motifs raisonnables en ce qui a trait à la perpétration d’une infraction précise et celle de la notion de «lieu virtuel suffisamment défini».

Le jugement de première instance ne contient pas d'erreur. Les policiers effectuaient une véritable enquête. Les annonces qu'ils ont publiées constituaient des lieux suffisamment précis et elles mettaient l’accent sur la jeunesse des femmes. De plus, les annonces étaient publiées sur des sites offrant uniquement des services d’escortes et, fait particulier, ils qui ont été utilisés par le passé pour offrir les services sexuels de bon nombre de fugueuses mineures. Enfin, les policiers n’ont pas offert la possibilité de commettre l’infraction à tous les utilisateurs des sites, mais plutôt à ceux qui sélectionnaient l’annonce affichant les mots «jeune beauté» ou une expression similaire et qui, après avoir communiqué avec l’agente d’infiltration, étaient informés que la jeune fille avait 16 ans. Les policiers ont limité le plus possible la portée et l’ampleur de cette technique d’enquête pour éviter d’hameçonner des personnes sans lien avec l’activité criminelle, tout en cherchant à réaliser une enquête efficace comme cela est leur rôle de le faire; il n’existait d’ailleurs pas d’autres techniques d’enquête efficaces pour de tels crimes.

Par ailleurs, il est inexact que la poursuite devait déposer les rapports antérieurs détenus par la police. Des soupçons raisonnables peuvent provenir de ouï-dire et d’une preuve purement testimoniale si cette preuve est jugée fiable par le juge du procès, comme c’était le cas en l'espèce. L’appelant aurait pu tenter de contredire l’enquêteur principal en lui demandant de déposer ces rapports en preuve. Il ne l’a pas fait et le juge pouvait certainement accepter le témoignage de l’enquêteur.

Il existait des soupçons raisonnables que les personnes qui fréquenteraient ces sites se livraient à l’infraction prévue à l’article 286.1 (1) du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46) (C.Cr.), laquelle présente un lien rationnel et proportionnel avec celle prévue à l’article 286.1 (2) C.Cr. En effet, outre la question de l’âge des jeunes filles, les éléments essentiels des 2 infractions sont identiques. Ce qui les distingue, c’est la peine qui leur est associée. Or, il ne s’agit pas d’un cas où la peine est si différente qu’il s’agirait d’infractions sans lien ou sans proportionnalité. Par ailleurs, la différence entre les niveaux de gravité des 2 infractions est tempérée dans le présent cas par le fait que les services sexuels offerts sous l’article 286.1(2) C.Cr. mettaient en cause une personne qui, même si elle était mineure, était en âge de consentir à des rapports sexuels.

 

Texte intégral de la décision : http://citoyens.soquij.qc.ca

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