Cour d'appel du Québec

Attorney General of Canada c. Richter Advisory Group Inc.

Schrager, Moore, Weitzman

 

Appels d’une ordonnance rendue par la Cour supérieure. Rejetés.

Les débiteurs intimés, endettés à hauteur de 9 192 413 $, ont, le même jour, déposé un avis d’intention ainsi qu'une requête en vue d'obtenir une ordonnance autorisant notamment un financement temporaire dont le remboursement serait garanti par une charge. Le juge de première instance a accueilli cette requête et a précisé que cette charge devait avoir priorité sur la fiducie réputée créée par l’article 227 (4.1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (L.R.C. 1985, 5^Te^R suppl., c. 1) à l'égard de retenues à la source non versées. Les créanciers appelants soutiennent que le juge n’avait pas le pouvoir de rendre cette ordonnance.

La question en litige commande de se pencher sur la portée de l’arrêt Canada c. Canada North Group Inc. (C.S. Can., 2021-07-28), 2021 CSC 30, SOQUIJ AZ-51783731, 2021EXP-1919, dans lequel la Cour suprême du Canada a conclu que les charges super prioritaires accordées par la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (L.R.C. 1985, c. C-36) ont priorité sur la fiducie réputée. Les dispositions de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies partagent, avec celles de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (L.R.C. 1985, c. B-3) concernant la proposition, le même objectif de redressement financier d’une compagnie débitrice insolvable, ce qui commande une application harmonisée des 2 régimes. Les dispositions concernant le financement temporaire, dans les 2 lois, sont d’ailleurs presque identiques.

En l’espèce, le juge avait compétence pour rendre l’ordonnance contestée et décider que la charge pour garantir le financement temporaire avait priorité sur les fiducies réputées des appelants. Rien dans la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, y compris ses articles 67 (2) et 67 (3), ne font obstacles à cette conclusion.

Le pouvoir du juge d’établir le rang de la charge garantissant un financement temporaire se trouve à l’article 50.6 (3) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité. En l'espèce, les appelants soutiennent que cette disposition est inapplicable puisqu’ils ne sont pas des créanciers garantis. Or, cette interprétation ferait en sorte qu’une telle charge aurait priorité uniquement sur les réclamations des créanciers garantis, ce qui est intenable. Par définition, toute sûreté établie pour garantir un financement temporaire conformément à l’article 50.6 (1) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité prend rang avant les réclamations des créanciers ordinaires ou non garantis comme le sont, en l’espèce, celles des appelants. D'autre part, il serait illogique que le juge puisse déterminer le rang de la charge dans le cadre du financement temporaire par rapport aux réclamations des créanciers garantis, mais pas par rapport à celles des autres créanciers. Enfin, l’interprétation proposée par les appelants aurait pour effet de rendre impossible l’obtention de financement temporaire pour les compagnies ayant une dette totale inférieure à 5 millions de dollars, ce qui ne peut correspondre à l’intention du législateur.

Au surplus, même si l’interprétation que fait la Cour est erronée, la conclusion serait la même. En effet, étant donné que l'article 11.2 de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et l'article 50.6 de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité sont identiques, l'absence d'un équivalent de l'article 11 de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies dans la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, dans le contexte actuel, doit être considéré comme une lacune à combler par l'exercice de la compétence inhérente de la Cour supérieure. Le juge pouvait donc rendre l'ordonnance contestée.

 

Législation interprétée: article 50.6 de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité

 

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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