Cour d'appel du Québec

Arc En Ciel RH c. Services Swissnova inc.

Dutil, Hamilton, Lavallée

Appels d’un jugement de la Cour supérieure. L’appel principal est accueilli en partie et l’appel incident est rejeté.

Les appelants, les créateurs et propriétaires d’un test psychométrique appelé Méthode Arc En Ciel (AEC), reprochent aux intimés, les anciens distributeurs de ce test, d’avoir copié leur méthode et d’avoir contrevenu au contrat de distribution liant les parties. Le juge de première instance a conclu à l'existence de la contrefaçon au sens de la Loi sur le droit d’auteur (L.R.C. 1985, c. C-42). Toutefois, il a estimé que les appelants n'ont pas l'intérêt pour agir sur ce fondement contre les intimés puisqu’ils ne sont pas les titulaires du droit d’auteur sur l’œuvre ainsi plagiée. Selon le juge, l’œuvre modifiée, qui a été créée par l'appelant Fabart, l’a été à partir d’une œuvre appartenant à Cleaver. Or, celle-ci est la seule titulaire du droit d’auteur sur cette œuvre ainsi que sur l’œuvre modifiée, et ce, en vertu du contrat de licence non exclusive la liant aux appelants. Ceux-ci soutiennent que le juge a erré en concluant que cette licence ne leur conférait pas l’intérêt pour agir afin de réclamer des dommages-intérêts sur le fondement de la contrefaçon. Ils prétendent aussi que le juge a commis une erreur en rejetant leurs réclamations fondées sur la concurrence déloyale.

Le juge n’a pas erré en concluant que les appelants ont créé un «assemblage» ou un «agencement», lequel a une plus-value qui transcende la simple somme de ses composantes. En effet, pour se qualifier d'«œuvre», une création doit être davantage qu’une copie, mais n’a pas à être en plus «novatrice ou unique». L’élément essentiel «est l’exercice du talent et du jugement» de son auteur, lequel implique nécessairement un effort intellectuel.

Le juge a cependant erré de manière manifeste et déterminante en concluant que les appelants n’avaient pas l’intérêt pour agir en justice afin de faire respecter cette protection parce que les composantes de la Méthode AEC sont toutes visées par la licence non exclusive de Cleaver. Selon la preuve, l’œuvre complète et globale des appelants n’est pas une modification de l’œuvre de cette dernière, mais une nouvelle œuvre, quoiqu'elle soit inspirée et dérivée du modèle de Cleaver. Les appelants, à titre d’auteurs, sont les titulaires du droit d’auteur sur cette œuvre nouvelle et originale (art. 13 (1) de la Loi sur le droit d’auteur) et ont donc l’intérêt juridique requis pour poursuivre les intimés en contrefaçon (art. 41.23 de la loi).

Quant à la conclusion du juge selon laquelle les intimés ont contrefait la Méthode AEC, elle se fonde sur la preuve et elle est conforme au droit.

Quelle réparation devrait-être accordée aux appelants sur le fondement de la contrefaçon?

Les dommages-intérêts préétablis prévus au paragraphe 38.1 (1) de Loi sur le droit d'auteur sont basés sur le nombre d'œuvres qui sont contrefaites. Toutes les violations que l’on peut associer à une œuvre sont donc traitées comme un tout dans l'attribution des dommages-intérêts statutaires.

En l'espèce, les intimés auraient dû se limiter à poursuivre les appelants pour la rupture unilatérale abusive et intempestive du contrat de distribution liant les parties et éviter de contrefaire sciemment la Méthode AEC, agissant ainsi à l’encontre des exigences de la bonne foi et causant un préjudice à ces derniers. Il y a donc lieu de condamner les sociétés intimées au paiement de la somme maximale prévue pour une violation du droit d’auteur, soit 20 000 $.

La concurrence déloyale

D'autre part, les appelants ont fait la preuve d’une contravention à la Loi sur les marques de commerce (L.R.C. 1985, c. T-13) et de leur préjudice découlant de la violation de leur marque de commerce, mais qu’ils ont échoué à le quantifier. Il est néanmoins possible de leur accorder des dommages symboliques en vertu de l’article 53.2 de cette loi.

Compte tenu des faits de la présente affaire et de la nature des reproches pouvant être formulés aux intimés selon la Loi sur les marques de commerce, la condamnation solidaire des sociétés intimées au paiement d’une somme globale de 10 000 $ est raisonnable.

 

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

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