Cour d'appel du Québec

Apple Canada inc. c. Autorité des marchés financiers

Savard, Marcotte, Healy

Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli la demande en irrecevabilité de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et ayant rejeté un pourvoi en contrôle judiciaire. Rejeté.

Apple Canada inc. a déposé un pourvoi en contrôle judiciaire à l'égard de la décision de l'AMF d’enquêter sur les activités d’assurance et de distribution des produits financiers de l'entreprise en lien avec son plan de protection AppleCare+ et de la délivrance de citations à comparaître lui ordonnant de transmettre plusieurs renseignements et documents aux fins de cette enquête. Apple a par ailleurs demandé à la Cour supérieure de déclarer que le plan AppleCare+ ne constitue pas un contrat d’assurance au sens de la Loi sur les assureurs (RLRQ, c. A-32.1) et du Code civil du Québec (L.Q. 1991, c. 64).

La juge de première instance n'a pas commis d’erreur en appliquant la norme de contrôle de la décision raisonnable. D’une part, la décision d’instituer une enquête sur le respect des règles entourant les produits financiers ainsi que la délivrance de citations à comparaître aux fins de l’enquête relèvent de la compétence exclusive de l’AMF, laquelle est protégée par une clause privative étanche et commande la déférence. D'autre part, aucune des exceptions invoquées dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Vavilov (C.S. Can., 2019-12-19), 2019 CSC 65, SOQUIJ AZ-51654335, 2020EXP-27, [2019] 4 R.C.S. 653, ne permet d'écarter l'application présumée de cette norme. La seule hypothèse voulant que le plan AppleCare+ puisse relever d’une garantie supplémentaire et faire l’objet d’une enquête parallèle de l’Office de la protection du consommateur ne crée pas un conflit opérationnel susceptible de donner lieu à l’application de la norme de la décision correcte.

La décision de l'AMF de mener une enquête à huis clos afin de déterminer s'il y a eu des manquements à la Loi sur les assureurs ou à la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2) découle de l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par l'article 12 de la Loi sur l’encadrement du secteur financier (RLRQ, c. E-6.1). La juge n'a pas commis d'erreur en concluant au caractère raisonnable de cette décision, laquelle paraît justifiée au regard du régime législatif applicable. De plus, les enquêteurs peuvent délivrer des citations à comparaître et requérir la communication de renseignements ou de documents en lien avec le sujet de l’enquête menée ou jugés essentiels afin de découvrir la vérité. Il s’agit d’un critère interprété avec souplesse par la jurisprudence et qui a été respecté en l'espèce. Le fait pour Apple d’être tenue de communiquer de l’information et de la documentation «de nature sensible et exclusive» n’est pas en soi préjudiciable dans un contexte de huis clos, pas plus d’ailleurs que le fait d’être visée par une enquête d’un organisme ayant pour mission la protection du public.

Par ailleurs, la juge n'a pas erré en refusant de qualifier le plan AppleCare+ à titre de contrat d’assurance ou de garantie supplémentaire. En effet, c’est l’existence de motifs raisonnables de croire qu’un manquement à la loi a été commis qui permet à l’AMF d’ouvrir une enquête, et non la qualification juridique du produit. L'enquête permettra à cette dernière de déterminer si le plan AppleCare+ est ou non un contrat d'assurance.

Enfin, il y a lieu de présumer qu’en confiant à l’AMF le contrôle et la surveillance des affaires d’assurance au Québec, le législateur a voulu qu’elle puisse interpréter les lois qu’elle administre, dont la Loi sur les assureurs. Ainsi, la définition de la notion de «produit d’assurances» au sens de cette loi relève de la compétence exclusive de l’AMF.

 

Texte intégral de l’arrêt : http://citoyens.soquij.qc.ca

Le fil RSS de la Cour d'appel vous permet d'être informé des récentes mises à jour.

Un fil RSS vous permet de vous tenir informé des nouveautés publiées sur un site web. En vous abonnant, vous recevrez instantanément les dernières nouvelles associées à vos fils RSS et pourrez les consulter en tout temps.


Vous cherchez un jugement?

Les jugements rendus par la Cour d'appel du Québec depuis le 1er janvier 1986 sont disponibles gratuitement sur le site internet de la Société québécoise d'information juridique (SOQUIJ): citoyens.soquij.qc.ca

Une sélection de jugements plus anciens, soit depuis 1963, est disponible, avec abonnement, sur le site internet de SOQUIJ : soquij.qc.ca