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Ville de Québec c. Ouellet

Travail - retrait préventif - travailleuse enceinte - affectation - refus de l'employeur - droit à la réaffectation - plainte - article 227 LSST

 

Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli le pourvoi en contrôle judiciaire d'une décision du Tribunal administratif du travail (TAT) portant sur une plainte en vertu de l'article 227 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (RLRQ, c. S-2.1) (LSST). Rejeté. 

Le TAT a rejeté la contestation de la travailleuse, une sergente de patrouille, d’une décision de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail et a déclaré que sa plainte en vertu de l’article 227 LSST était irrecevable puisque le refus de l'employeur de considérer sa demande de réaffectation, alors qu'elle était enceinte, ou de faire droit à cette demande ne constituait pas une sanction, une mesure discriminatoire ou une mesure de représailles. À cet égard, le TAT a retenu que le régime de retrait préventif de la travailleuse enceinte se limite au droit d’être retirée préventivement du travail et que la Loi sur la santé et la sécurité du travail ne prévoit pas un droit à la réaffectation à d'autres tâches. La Cour supérieure a accueilli le pourvoi en contrôle judiciaire de la décision du TAT. Elle a conclu que cette décision ne respectait pas les enseignements de la Cour suprême du Canada dans Dionne c. Commission scolaire des Patriotes (C.S. Can., 2014-05-01), 2014 CSC 33, SOQUIJ AZ-51068933, 2014EXP-1464, 2014EXPT-843, J.E. 2014-825, D.T.E. 2014T-320, [2014] 1 R.C.S. 765, qui reconnaît dans les articles 40 et 41 LSST un droit à la réaffectation, bien que celui-ci n'entraîne pas une obligation de résultat pour un employeur. La Cour a considéré que, en ne tenant pas compte de ce précédent, le TAT avait omis d'examiner les motifs de refus de l'employeur, soit le seul exercice qui lui aurait permis de déterminer si la plainte était fondée. 

La juge de première instance n’a commis aucune erreur révisable. Elle a bien appliqué la norme de contrôle de la décision raisonnable et a eu raison de conclure que la décision du TAT était déraisonnable. En effet, cette décision occulte les conséquences du retrait systématique du travail pour les travailleuses enceintes qui souhaiteraient y demeurer durant leur grossesse alors que c’est l’élimination à la source des dangers qui devrait primer. Par ailleurs, un employeur n’a pas une obligation de résultat en matière de réaffectation d’une travailleuse enceinte ou qui allaite, mais une obligation de moyens. Il doit toutefois agir et prendre les moyens raisonnables pour satisfaire à cette obligation. Pour ce faire, il doit véritablement considérer la demande de réaffectation d'une travailleuse et ce n’est que s'il est impossible d'y donner suite que la travailleuse sera retirée du travail et recevra une indemnité de remplacement du revenu. Un employeur a également l'obligation, le cas échéant, d'informer la travailleuse des raisons qui font en sorte qu’elle ne peut être affectée à d’autres tâches durant sa grossesse. Enfin, l’article 227 LSST s’applique pour l’exercice de tous les droits qui résultent de la loi, et l'exercice du droit au retrait préventif en fait partie. Le TAT devra se prononcer sur le fond et déterminer si la travailleuse a subi une sanction au sens de l’article 227 LSST, et ce, à la lumière des motifs invoqués par l'employeur pour refuser la réaffectation de cette dernière.

 

Législation interprétée : articles 40 et 41 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail 

 

Texte intégral de la décision : https://citoyens.soquij.qc.ca